Un rapport, réalisé par trois anciens procureurs internationaux sur la base du témoignage d'un ancien geôlier, accuse Damas d'avoir systématiquement recours à la torture dans ses prisons. Le document de 31 pages, publié lundi 20 janvier par la chaîneCNN et le quotidien The Guardian, contient des images de corps portant des marques de lacérations, de strangulation ou d'électrocution, des visages sans yeux et des corps affamés dont la plupart montrent des signes de torture.
Ancien procureur du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, David Crane n'hésite pas à affirmer qu'il s'agit de « preuves évidentes [montrant] que le régime d'Al-Assad est une machine à tuer ». M. Crane a travaillé avec Desmond de Silva, ancien procureur en chef du Tribunal spécial pour la Sierra Leone, et Geoffrey Nice, ancien procureur en chef lors du procès de l'ex-président yougoslave Slobodan Milosevic.
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« IL DEVAIT PHOTOGRAPHIER CHAQUE CORPS »
Les auteurs du rapport affirment disposer de 55 000 images d'au moins 11 000 victimes des geôles syriennes, mortes entre mars 2011 et août 2013. Ils les ont obtenues grâce à un policier militaire qui travaillait secrètement pour l'opposition. Identifié sous le pseudonyme de « Caesar », l'homme leur a expliqué avoir été photographe pour la police militaire, avant de faire défection et de fuir le pays. Sa mission aurait été de prendre des images des cadavres. Il assure cependant n'avoir pas assisté à des séances de torture.
« Lorsque les détenus étaient tués, leurs cadavres était transportés à un hôpital militaire où Caesar était amené. Accompagné par un membre de l'administration judiciaire, il devait photographier chaque corps. Il pouvait y en avoir 50 par jour », affirment les auteurs du rapport.
L'homme aurait fait sortir les images du pays en les transmettant à un contact au sein d'un groupe d'opposition soutenu par le Qatar. Après l'avoir rencontré à trois reprises lors des dix derniers jours, les experts l'ont jugé « crédible » et « sincère ».
« CONVAINCRE UN TRIBUNAL » INTERNATIONAL
Pour les juristes, ces preuves sont « capables de convaincre un tribunal de l'existence de meurtres et tortures sytématiques par des agents du gouvernement syrien. Cela pourrait contribuer à trouver des crimes contre l'humanité, et a étayer des accusations de crimes de guerre contre le régime syrien ».
Comme le note The Guardian, « l'ONU et des experts indépendants ont déjà récolté de preuves d'abus de la part du régime et des rebelles, mais selon les auteurs du rapport, il s'agit ici de preuves plus détaillées et prouvant des crimes sur une plus grande échelle que tout ce qui a été découvert jusqu'ici ».
Et, si la fin du conflit syrien n'est pas en vue, un panel de juges et de juristes travaillent déjà à la conception d'une cours pour permettre aux victimes de se faire entendre. « C'est totalement inédit », explique à l'AFP David Crane. « En général, la communauté internationale observe et attend. Une fois qu'une solution politique a été trouvée et que la tuerie s'est arrêtée, tout le monde peine à trouver la marche à suivre », souligne M. Crane, professeur à l'université de Syracuse, aux États-Unis.
Lire : La Syrie ou l'"Archipel de la torture", selon HRW
Commandé par un cabinet d'avocats londonien agissant pour le Qatar, le rapport est mis à la disposition de l'ONU, des gouvernements et des associations humanitaires. « Sa publication semble ne rien devoir au hasard », poursuit le quotidien britannique. En effet, la conférence de Genève 2, à laquelle doit participer le régime ainsi que l'opposition syrienne, doit avoir lieu mercredi en Suisse.
Le rapport sur la torture systématique en Syrie (attention, certains photos peuvent être choquantes)
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