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Saturday, 21 May 2011

De DSK en général et de Bouteflika en particulier. - Le blog de Mohamed Sifaoui

boutedsk.jpg En ous et moi.
À la vérité, c’est là l’illustration qui montre qu’une très vieille France se réveille parfois, y compris à travers ceux qui, habituellement, nous parlent d’égalité devant la justice, de féminisme, de bienséance et j’en passe, pour nous expliquer qu’en réalité, lorsqu’une femme de chambre, d’origine africaine, habitant un quartier pauvre de New York poursuit, pour tentative de viol, un Directeur général du FMI, riche, puissant, célèbre et présidentiable, outre que ce dernier est évidemment « présumé innocent » (personne n’a le droit de remettre ce principe en question), l’accusatrice, elle, est, presque de facto, présumée coupable. Soyons clairs : ceux qui nous disent, depuis une semaine, qu’il ne faut pas « condamner » DSK, nous affirment, en filigrane, qu’au mieux, la femme de chambre serait une mythomane au pire le rouage d’une vaste machination orchestrée par les Chinois, le Parti socialiste, Nicolas Sarkozy et Vladimir Poutine. Personnellement, je trouve cette approche tout simplement lamentable. Et est d’autant plus lamentable quand ce sont des Bernard-Henry Lévy, des Jean-François Kahn ou des Jack Lang qui l’expriment, car, je n’oublie pas que ce sont là, des noms parmi d’autres, qui avaient plutôt tendance à nous expliquer le féminisme…Mais passons.
La situation du désormais ex-directeur général du FMI est pourtant simple. Dans tous les cas de figure, il y a un coupable et il y a une victime. Alors soit DSK a effectivement cherché à violer la jeune femme et il est coupable, soit celle-ci l’accuse à tort et c’est elle qui l’est. Or, même si la police a jugé utile d’arrêter DSK et même si le Procureur de New York estime qu’il dispose de suffisamment d’éléments pour le poursuivre et même si un jury populaire l’inculpe, certaines voix, toujours les mêmes, à l’évidence très mal inspirées sur ce coup, continuent de nous rappeler que « Dominique est présumé innocent ». Donc, disent-ils, certes sans le dire, c’est son accusatrice qui est présumé coupable. Elle n’aurait, par conséquent, pas le droit de bénéficier, à son tour, de la même présomption d’innocence. Forcément ! Nos grands clercs ont décidé que le traitement devrait être inéquitable. Lui Dominique, elle Naffissatou, lui riche, elle pauvre, lui, homme, elle, femme, lui blanc, elle noire, lui candidat à la candidature pour la présidence française, elle, tout au plus, candidate au syndicat des femmes de ménage, bref, lui en haut, elle, en bas. Lui dispose d’amis médiatiques qui savent que ça, ne n’est pas Dominique, elle, personne ne sait qu’elle n’est pas capable d’inventer une telle histoire. En effet, tout les sépare. DSK on le connaît et cela « ne lui ressemble pas. Il s’agit juste d’un séducteur, d’un jouisseur qui a parfois les mains baladeuses ». Rien de grave dans le pays de Jaurès. Par contre, elle, personne ne la connaît, mais comme elle est femme de chambre, pauvre et inconnue, ça lui ressemble d’accuser des hommes célèbres de tentative de viol. Voilà le raisonnement de ceux qui veulent d'une justice pour les copains et les coquins et d'une autre pour les inconnus et les sans grades…Mais passons
Rassurons-nous, il arrive que « la France d’en haut » ou qu’une partie d’entre elle protège les personnes d’origine africaine, issues de pays sous-développés. Oui rassurons-nous. Non je ne veux pas parler de ces Tunisiens et de ces Libyens de Lampedusa. Mon propos concerne ces autres africains : les plus puissants d’entre eux. C’est ainsi que la France intelligente n’a aucun mal à prendre la défense de certains « présumés innocents » lorsqu’ils sont dirigeants de pays africains ou arabes. On peut par exemple estimer qu’il est urgent de mettre hors d’état de nuire tout petit délinquant qui surgit ici ou là, mais qu’il est raisonnable de laisser Saïd Bouteflika, le frère du président algérien, pour ne citer que ce freluquet, disposer de biens à Paris, fruit de l’affairisme illégale et de la corruption endémique qui ronge l’Algérie. On peut se dire qu’il est normal, puisque « la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde », qu’elle reçoive, chez elle, toutes les richesses du monde, y compris celles mal acquises. Aussi, un ministre algérien peut, de façon quasi naturelle, acheter des biens à Paris, y scolariser ses enfants et venir se soigner, réaliser des affaires avec tel ou tel milliardaire, mais il faut, en même temps, soupçonner tous ceux qui ne sont ni ministres ni généraux ni officiers de sous-préfectures de tentative d’immigration clandestine dès le moment où ils réclament un visa pour venir en France.
Tenez une illustration : cette semaine, le 19 mai, je devais, à l’invitation du Club arabe de la presse, faire une conférence autour de mon prochain livre Bouteflika, ses parrains et ses larbins. Cette rencontre qui devait avoir lieu au Centre d’accueil de la presse étrangère (CAPE), rattaché au ministère français des Affaires étrangères, a tout simplement été annulée. Le quai d’Orsay, institution connue pour ménager le chou et la chèvre et fidèle à la vieille traditionfrançafricaine, a estimé, sans même lire le livre, qu’il serait inopportun de laisser s’exprimer un auteur qui dénonce un régime corrompu, autoritaire et liberticide. Cela n’est pas grave puisqu’effectivement il y a d’autres espaces d’expression en France (heureusement !). J’aurais amplement l’occasion, en effet, durant les semaines et les mois à venir d'aborder le sujet. Toujours est-il qu’on ne peut s’empêcher de constater que le Quai d’Orsay juge que Bouteflika est de fait « présumé innocent » et que je serais de fait coupable d’avoir écrit un « livre polémiste ».
Un peu comme pour la femme de chambre, dénoncer les agissements d’un puissant est perçu parfois comme une faute lourde. DSK n’aura rien fait de grave nous dit-on même s’il est reconnu coupable. Il aurait voulu juste assouvir quelques fantasmes. Tout comme pour Bouteflika qui a violé la Constitution algérienne (en ce qui le concerne, c’est prouvé), il n’y a quand même pas mort d’homme. Les choses sont claires : quoi de plus naturel qu’un puissant qui cherche à transformer ses désirs en réalité.
Mais dans la vie, même pour ceux qui se croient invulnérables, dure est toujours la chute !



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