DÉCRYPTAGE - Pacifistes, objecteurs de conscience ou religieux ultra-orthodoxes, une petite partie de la population israélienne s’oppose ouvertement à la politique de son gouvernement...
Ils ne sont que quelques-uns contre une majorité écrasante. En Israël, 87 % de l’opinion publique est favorable à la poursuite des opérations militaires dans la bande de Gaza jusqu’au renversement du Hamas, selon un sondage diffusé cette semaine à la télévision. Pourtant, certains, qu’ils soient Palestiniens citoyens d’Israël ou juifs israéliens, s’opposent à la guerre.
Les manifestants anti-guerre
Ils étaient plusieurs milliers à s’être rassemblés samedi soir à Tel-Aviv lors de la manifestation la plus importante depuis le début de l’opération dans la bande de Gaza. D’autres avaient auparavant eu lieu ailleurs dans plusieurs villes, comme à Haïfa, dans le nord du pays. Des manifestations qui regroupent des Palestiniens citoyens d’Israël, qui représentent un quart de la population du pays, des membres de partis politiques de gauche et d’extrême gauche (commeBalad ou le parti communiste israélien), des membres de mouvements pacifistes (comme La Paix maintenant), des citoyens lambda ou des artistes.
Certains rassemblements se sont soldés par des arrestations -des membres de la Knesset, comme la députée du parti Balad, Hanin Zoabi, ont même eu affaire à la police- et des incidents assez violents. Des groupes d’extrême droite ont ainsi attaqué certains cortèges. «C’est une caractéristique nouvelle. Les groupes d’extrême droite passent désormais à l’agression physique, note Robert Kissous, membre du bureau national de l’Association France Palestine Solidarité. Alors qu’auparavant, les manifestants pacifistes ne recevaient qu’injures et crachats, ils sont maintenant passés à tabac.»
Les Israéliens opposés à l’occupation sont en effet jugés comme traîtres ou au moins antipatriotes par leurs concitoyens. «Ce qui est important en Israël, c’est la patrie, il faut donc suivre la politique du gouvernement. Si elle déplaît, il ne faut rien dire, rien faire. Car s’exprimer contre cette politique, c’est trahir. Trahir Israël, trahir les soldats qui combattent… La liberté d’expression est bien réelle sur beaucoup de choses, mais pas en ce qui concerne l’armée. C’est un tabou de critiquer Tsahal», explique Martine Brizemur coordinatrice de la commission Israël, Territoires occupés, Autorités palestinienne chez Amnesty International France.
Les objecteurs de conscience («refuzniks»)
Alors qu’en Israël le service militaire est obligatoire pour les jeunes filles et garçons à partir de 18 ans, et qu’un grand nombre de citoyens israéliens sont réservistes, certains refusent, pour des raisons de conscience, de servir dans l’armée, qu’ils considèrent comme une armée d’occupation. «C’est un mouvement qui existe depuis longtemps. Les premiers "refuzniks" sont apparus pendant la guerre du Liban dans les années 80», explique Robert Kissous, qui a rencontré en avril dernier plusieurs signataires d’un courrier au Premier ministre israélien, Benyamin Nethanyahou, lui expliquant les raisons de leur refus de faire leur service militaire. Selon Robert Kissous, «le nombre de refuzniks varie, mais la tendance actuellement est à la hausse.»
Et ce, malgré les risques. «Quand ils refusent de servir, ils sont d’abord condamnés à quelques semaines de prison, puis relâchés, appelés de nouveau et re-condamnés s’ils refusent encore de répondre à l’appel, le nombre de jours d’emprisonnement augmentant au fur et à mesure des condamnations», indique Martine Brizemur. Soutenus par différentes associations, ils se voient -au terme de neuf ou dix appels en général- déclarés «inaptes». «Cela les dessert souvent pour trouver un travail ou continuer leurs études», continue Martine Brizemur. «Ils ont alors besoin d’un soutien très fort, ce qui peu être difficile à trouver chez les juifs israéliens, dans la mesure où leur opprobre retombe également sur leur famille.»
Ce mouvement s’accompagne de celui d’anciens soldats qui ont pris conscience de ce qui se passait en Cisjordanie et à Gaza et militent contre l’occupation, comme les vétérans de Breaking the silence, qui témoignent pour «éveiller les consciences de ce qui se passe vraiment dans les territoires occupés au jour le jour».
Les Neturei Karta
En araméen, «les gardiens de la cité». Ce groupe de juifs haredim (ultra-orthodoxes) est radicalement antisioniste, ouvertement pro-palestinien, et prône le «démantèlement» de l’État d’Israël. Cette faction considère que toute tentative humaine de recréer un État juif avant la venue du Messie est une attaque contre la volonté divine. La plupart des haredim ne s’engagent pas dans l’armée, et certains étaient même présents lors de la manifestation pro-palestinenne à Paris mercredi dernier.
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